n° 84

 

Jean -Pierre BACOT

 

Introduction aux médias

La concurrence est rude entre les collections de poche à vocation universitaire qui balisent désormais l'édition en Sciences de la Communication, faisant au passage preuve d'une nouvelle étape dans son installation comme discipline. C'est chez Montchrestien que Jérôme Bourdon, chercheur à l'INA, propose sa synthèse personnelle en insistant sur les courants et des figures dominantes.

L'auteur définit le média de masse à travers quatre critères principaux : la technique, l'organisation, le contenu et le public et propose des repères très utiles à qui aborde ce champ, puis pose trois grands domaines de réflexion sur lesquels il résume savamment l'état de la recherche.
Les théories de fond sont représentées par un cercle très heuristique où se placent « empiristes », « critiques néo-marxistes » et « prophètes », réunis sous quatre pôles cardinaux, l'optimiste, le pessimiste, le scientifique et le prophétique. Nous laissons au lecteur le soin de visualiser cette représentation du champ théorique où il pourra à son aise placer telle ou telle de ses connaissances et se poser lui-même.

Bourdon parcourt ensuite ce qu'il nomme les « théories intermédiaires lesquelles » se donnent pour tâche de vérifier un certain nombre d'hypothèses qu'elles mettent à l'épreuve sur une portion de terrain » Certains lecteurs apprécieront de pouvoir sortir ainsi du cercle des « fondamentaux ». Suit enfin une mise en perspective de l'Économie Politique des Médias où modèles et métiers sont expliqués avec de nombreuses références aux travaux spécialisés.

En constatant la persistance des oppositions théoriques dans un univers qui reste à ses yeux marqué par la croyance, l'auteur indique dans sa conclusion : « d'un écrit à l'autre, d'une génération à i `autre, les balancements persistent : médias dominants ou publics actifs ? Professionnels puissants ou dépendants ? Messages ouverts ou fermés ? On peut seulement observer que le souci de la nuance a gagné tous ceux qui travaillent sur le public, public auquel on concède partout quelque autonomie. »


* Jérôme Bourdon. Introduction aux médias. Montchrestien, Collection Clefs Politique, 160 pages, 60 francs.

 

La société informationnelle

Dans une nouvelle collection de l'Harmattan, dédiée au couple Communication et Civilisation, Anne Mayère dirige la publication d'un ensemble de textes consacrés à la Société Informationnelle. C'est Blaise Cronin, chercheur installé dans l'Indiana, qui présente en son introduction les lignes de force de cette production collective : l'analyse des enjeux sociaux du grand flux d'information qui marque notre époque et des approches économiques que l'on peut proposer pour en saisir l' ampleur et les effets réels.

On appréciera que les divers contributions de l'ouvrage soient dotées d'une solide bibliographie, en même temps que l'on regrettera l' absence de lignes introductrices expliquant ce qui structure ce projet éditorial. A ce détail près de mise en forme de ce qui semble être le fruit d'un colloque mais ne le dit pas, l'ensemble est académique au meilleur sens du mot, propre à laisser circuler la pensée dans une des variantes des études en Sciences de la Communication, l' approche socio-économique.

Il s'agit de savoir en effet comment l'on peut définir et mesurer la valeur de l'information et de repérer de quelle manière le développement informationnel dont il est fait grand cas autour d'Intemet ou des autoroutes influe réellement sur le développement des sociétés. Questions posées dans le monde de la recherche depuis quelque trente ans, pour lesquelles l'ensemble des auteurs plaide une poursuite du chantier, la multiplication des enquêtes et la sortie du temps, prévu mais pourtant bu jusqu'à la lie des discours prophétiques.


* Sous la direction d'Anne Mayère, avec Sandra Braman, Herbert B. Brinberg, Thomas E. Pinell, Rebecca O. Barclay, Blaise Cronin, Jean- Claude Dessimoz, Daniel Dufourt, RainerKuble, Donald Lamberton. La société informationnelle. L `Harmattan, Communication, 1997, 240 pages.

 

 

Proust sociologue

La culture, mode de conflit social utilisé au profit d'une bourgeoisie montante et verdurante aux dépends d'une aristocratie perdurante et de Guermantes, telle est la thèse principale de Catherine Bidou-Zachariasen qui choisit à son tour la Recherche comme terrain de lecture non littéraire. La première partie de son « Proust sociologue » est occupée par le glissement qui s'opère dans l'oeuvre depuis la Maison de la « charmante princesse des Launes », jusqu'au salon de Madame Verdurin, la carrière des personnages étant envisagée sous l'angle principal d'un conflit de classe joué dans un petit espace parisien entre 1880 et 1920.

La seconde partie du livre envisage le salon comme un modèle historique de mobilité sociale, ce qui était essentiellement un lieu chez les aristocrates devenant chez les bourgeois une institution. Si Proust n'aura certes pas été le seul à situer une fiction dans ce cadre, il est pour notre auteur le premier à en avoir fait un terrain d'enjeux, de jeu, de tactique et de « stratégies de territorialisation de capital symbolique ». Qu'en termes sociologiques ces choses-là sont dites . . .

Après d'autres auteurs, sociologues ou philosophes, qu'elle cite et critique parfois pour avoir par exemple (V. Descombes) trop simplifié la tension qui parcourrait « la recherche du temps perdu » entre le poids du mérite personnel des personnages et celui de leur rôle social, Catherine Bidou Zachariasen présente in fine une analyse qui passionnera littéraires, historiens et sociologues, ethno-méthodologues comprise et que nous ne nous risquerons pas à résumer. Il y va à la fois d'un ré-enchantement du monde par l'oeuvre d'art et d'une inversion générale dont on lira avec plaisir la pertinence avec laquelle l'auteur nous la propose en extrême fin de délicat volume.


* Catherine Bidou-Zachariasen. Proustsociologue ; de la maison aristocratique au salon bourgeois. Descartes et Cie, Paris, 1997, 212 pages, l25francs.



Le paysage télécommunicationnel

Cet ouvrage devrait permettre une approche synthétique et cohérente des réseaux qui servent de support aux produits et services nouveaux dont la mise en oeuvre sera facilitée par l'application du concept architectural du réseau intelligent. En attendant, pour les années 90, le RNIS constitue un des enjeux majeurs des Télécoms ; il en est de même de l'Administration de Réseau, point d'accès privilégié sinon obligé aux Réseaux d'Entreprise.

La conclusion du livre met l' accent sur les progrès technologiques qui ont permis un développement rapide des réseaux et des services et donne quelques perspectives dans un nouveau contexte économique et réglementaire. L'étude se termine par une série d'annexes, qui précise la terminologie employée, aide le lecteur dans la recherche alphabétique des termes ou expressions utilisés, ajoute quelques éléments techniques et administratifs et donne des références bibliographiques.


* René Parfait. Paysage des réseaux de télécommunications. Paris, Masson, 1997. (Collection technique et scientifique des télécommunications (CNET-ENST).